Observatoire français des tornades et orages violents

Bilan de l'activité orageuse de l'été 2022

La compilation des données kérauniques de l'été 2022 est achevée, un bilan de l'activité orageuse observée au cours des mois de juin, juillet et août 2022 peut être établi. Cet été 2022 extrêmement chaud a débuté de manière très orageuse, avant que la masse d'air ne s'assèche en juillet et août.
 
Extranuageux au large de Saint-Jean-Cap-Ferrat (06) le 28 août - Janis BROSSARD


Un début d'été très actif avant une baisse remarquable de l'activité en juillet

L'été 2022, deuxième plus chaud jamais observé a été ponctué d'épisodes caniculaires parfois exceptionnels. L'été reste au final très contrasté, avec une activité globalement plus faible que la normale, surtout au niveau de l'intensité des orages. Ainsi, 78 jours d'orage ont été enregistrés, soit une valeur donc légèrement inférieure à la moyenne 2009-2021
Au total, 85% des journées estivales ont été orageuses sur le territoire français.

Les orages ont été fréquents et parfois virulents au début de l'été, particulièrement en juin. Il s'agit du mois de juin le plus orageux depuis 2009 avec un indicateur de sévérité orageuse de ce mois proche de 10, soit une valeur remarquable, la deuxième plus élevée derrière mai 2018.
Mais cette activité convective a marqué un brutal coup d'arrêt dès la fin du mois de juin et surtout en juillet. Totalement à l'opposé de juin, le mois de juillet s'est révélé le moins orageux de ces 13 dernières années avec un indicateur de sévérité orageuse retombé à 2,5.
Enfin, le mois d'août a été contrasté, avec des orages extrêmement fréquents sur les reliefs du sud (Alpes et Pyrénées) et au final peu d'orages dans les zones de plaine et une sévérité très réduite. 

On observe sur le graphique ci-dessous l'évolution des indicateurs de sévérité orageuse quotidiens, qui combinent fréquence et sévérité des orages. Il ressort clairement un arrêt brutal de l'activité très soutenues de juin dès le début du mois de juillet. Jusqu'à la fin de l'été, seuls des épisodes sporadiques ont été comptabilisés mais majoritairement peu sévères.


Indicateurs de sévérité orageuse quotidiens - Eté 2022

 
D'une manière relativement classique en cette saison, on rencontre un nombre maximal de jours avec orage près des reliefs, tandis qu'une activité orageuse plus faible est constatée en allant vers les plaines.
Une fois n'est pas coutume, ce sont les Hautes-Pyrénées qui enregistrent le nombre de jours d'orage le plus élevé de la saison (50 jours). Viennent ensuite la Haute-Garonne (47 jours), les Pyrénées-Atlantiques (44 jours) et les Pyrénées-Orientales (43 jours).
La climatologie est donc contre-dite par cet été 2022. En effet, le sud des Alpes, habituellement davantage soumis aux orages, avec seulement 35 à 40 jours enregistrés entre Hautes-Alpes et Alpes-Maritimes, ce qui représente un score très faible.
A l'inverse, plus d'un tiers des départements de métropole relèvent moins de 20 jours d'orage sur l'été. Ils sont tous situés sur le nord du pays, davantage exposé à des flux continentaux très secs et peu propices aux orages.
 
Si l'on confronte ces données à la moyenne 2009-2021, on remarque que la fréquence des orages cet été présente une anomalie peu marquée à l'échelle nationale (-1 jour). 
On observe à l'échelle départementale des disparités remarquables. Un très fort excédent est à noter sur les Pyrénées avec une anomalie de +10 à +17 jours d'orage par rapport à la normale. A l'opposé, des déficits sont relevés sur plus de la moitié des départements. Ceux-ci atteignent jusqu'à -10 jours en allant près des frontières du nord du pays.

 

Nombre de jours avec orages durant l'été 2022 et écart à la moyenne 2009/2021 (c) KERAUNOS
 
 

De fortes chutes de grêle cantonnées sur le mois de juin

De fortes chutes de grêle ont déjà été observées en mai, notamment dans l'ouest et le nord-est du pays. L'été s'est poursuivi sur un rythme particulièrement grêligène en juin, avant un brutal coup d'arrêt à la fin du mois de juin. La suite de l'été, dominée par des conditions très sèches, anticycloniques et caniculaires, s'est révélée peu propice à la grêle.
Ainsi, on a compatabilisé près de 2400 chutes de grêle fortes (> 2 cm de diamètre) en juin, contre seulement 251 en juillet et 155 en août. La très grande majorité des fortes chutes de grêle estivales s'est donc produite en juin, au cours des épisodes des 3 et 4 juin et de la séquence orageuse du 18 au 23 juin en particulier.


Chutes de grêle > 2 cm relevées en juin, juillet et août 2022

Le troisième été le plus instable en France

A échelle nationale, cet été 2022 a présenté un fort excédent d'instabilité, avec une MUCAPE supérieure de +70% par rapport à la normale 1985-2016 ; il se positionne de fait au 3ème rang des étés les plus instables en France depuis la fin des années 1940, juste derrière les étés 1983 et 2018.
Cet excédent d’instabilité latente est particulièrement marqué sur la moitié sud du pays, là où la masse d'air s'est montrée continuellement la plus chaude. L'excédent dépasse ainsi les +100% sur l'ensemble de l'arc méditerranéen. Ainsi, l'été 2022 devient l'été le plus instable dans les Pyrénées-Orientales, l'ensemble de la Provence et la Corse. Il est le deuxième plus instable de l'Ariège à la vallée du Rhône (Drôme/Ardèche).

On observe ensuite un dégradé en allant vers le nord, pour finalement atteindre des déficits d'instabilité au nord de la Seine, culminant à -12% sur le Nord. 
Ainsi, comme durant l'été 2018, un contraste nord / sud assez net a caractérisé cette saison estivale en matière d'instabilité.
Les journées les plus instables de l'été 2022 ont été observées le 5 août, le 19 juillet et le 21 juin.


Pour ce qui concerne la pression atmosphérique, on constate d’une manière générale que cet été 2022 a été un peu plus anticyclonique que la normale, notamment sur les régions du nord, qui enregistrent un écart d’environ +1.5 à +2 hPa par rapport à la normale 1971-2010.  Les flux continentaux induits par des hautes pressions souvent très septentrionales ont ainsi inhibé l'instabilité en allant vers la mer du Nord. A contrario, la chaleur a favorisé le développement de pressions plus faibles en allant vers la Méditerranée. 

En altitude, on note également une configuration particulièrement propice aux vagues de chaleur sur la France. Une anomalie anticyclonique marquée est en effet bien identifiable du centre Atlantique au nord-est de l'Europe en passant par la France. Le flux océanique a ainsi été anéanti par cette ceinture de hauts géopotentiels. Cette configuration atypique des centres d'actions explique la récurrence d'épisodes de chaleurs parfois extrême jusque sur le nord de la France. 
Enfin, sans surprise, cet été 2022 qui s’est illustré par des pics de chaleur parfois extrêmes au sol a également enregistré une forte anomalie chaude vers 1500 mètres d’altitude (ci-dessous à droite), avec un excédent moyen sur le sud de la France d'environ 2.5°C sur les normales récentes. Ceci le positionne au 2ème rang des étés les plus chauds à cette altitude sur la France depuis la fin des années 1940, derrière 2003. Sur les Bouches-du-Rhône, le Var et la Corse, il s'agit même de l'été le plus chaud à cette altitude.