Observatoire français des tornades et orages violents

L'année 2022 s'est révélée peu orageuse en terme de fréquence, affaiblie par un début d'année et un mois de juillet très peu orageux. En revanche, de nombreux phénomènes sévères ont été observés, sur le plan de la grêle, des tornades et des rafales de vent. Bilan complet.

Au niveau national, on dénombre 228 jours avec orage en 2022, soit une valeur inférieure à la moyenne de ces 13 dernières années. 62% des journées de l'année ont ainsi été marquées par au moins un orage sur la France.  Il faut toutefois noter que ce score est sensiblement tiré vers le bas par un premier trimestre particulièrement peu orageux sur la France et un mois de juillet très sec et très chaud, et donc peu orageux.

Comme les trois années passées, aucun département ne dépasse la barre des 100 jours avec orage sur l'ensemble de l'année. C'est près des Pyrénées que la fréquence des orages a été la plus forte cette année. Le département des Hautes-Pyrénées enregistre ainsi 89 jours d'orage. Suivent ensuite les départements des Pyrénées-Atlantiques, de la Haute-Garonne et des Alpes-Maritimes avec 80 jours. 

De manière un peu plus conforme à la climatologie, ce sont les départements du nord de la France qui comptent le plus faible nombre de jours avec orage cette année encore. Hormis Paris et la petite couronne, dont le chiffre est à considérer en regard de leur très faible superficie, ce sont les départements de l'Oise et du Pas-de-Calais (35 jours), du Finistère (36 jours), des Ardennes (37 jours), des Côtes-d'Armor et de l'Orne (38 jours) qui ressortent avec le nombre de jours avec orage le plus faible.

Par rapport à la moyenne de ces 13 dernières années, la France enregistre un déficit de jours d'orage qui s'élève à -17 jours. A l'échelle départementale, le constat est contrasté, avec plus d'un tiers des départements qui observent un excédent en 2022, qui s'étend de +1 à +19 jours. C'est sur les Hautes-Pyrénées que l'excédent est le plus marqué et assez remarquable avec +19 jours par rapport à la moyenne de ces 13 dernières années. On observe +18 jours en Haute-Garonne, +10 jours en Haute-Saône et + 7 jours dans les Landes, la Loire et la Côte-d'Or.
Près de deux tiers des départements sont en déficit, parfois sévère, atteignant -17 jours sur la Haute-Corse, -16 jours sur le Pas-de-Calais, -13 dans le Vaucluse, -11 dans les Bouches-du-Rhône et -10 jours dans les Alpes-Maritimes et l'Oise.

Néanmoins, l'activité électrique a été parfois forte lors des épisodes orageux, ce qui conduit certaines régions à présenter des densités de foudroiement élevées en 2022, malgré un déficit du nombre de jours avec orage

Au total, on dénombre en 2022 : 67 jours d'orage fort (grêle > 2 cm ou rafale > 90 km/h ou tornade ou lame de 50 mm en 1h), soit un score bien plus élevé qu'en 2021. On comptabilise par ailleurs 21 jours avec orage violent (grêle > 5 cm ou rafale > 120 km/h ou tornade >=EF2 ou lame de 100 mm en 1h) et 4 jours avec orage extrême (grêle > 10 cm ou rafale > 150 km/h).

Pour plus d'informations, consultez les bilans mensuels de l'année 2022, et les données détaillées par département.

L'analyse de l'indicateur de sévérité orageuse (I.S.O) montre clairement, comme chaque année, que plusieurs vagues orageuses ont concerné la France durant cette année. L'activité la plus significative a été relevée essentiellement entre la mi-mai et le début du mois de juillet avec un pic très net en juin. Par la suite, quelques pics plus espacés sont identifiés.

Au niveau national, l'I.S.O moyen annuel ressort à 2,86 soit une valeur supérieure à la moyenne 2009-2021. Ce score confirme donc qu'en dépit d'une fréquence moindre, les orages ont été plus sévères qu'à l'ordinaire. A noter que la journée la plus orageuse en terme d'I.S.O est celle du 4 juin avec un score exceptionnellement élevé de 34,26.

21 tornades certaines (liste 1) ont été recensées en 2022, dont la tornade EF3 de Bihucourt. On relève par ailleurs près de 250 rafales convectives > 90 km/h (+30% par rapport à 2021) dont l'exceptionnel derecho d'août sur la Corse, environ 4189 chutes de grêle > 2 cm (en très forte hausse par rapport aux trois dernières années), plus de 1700 lames d'eau significatives sous orages (niveau en baisse par rapport à 2021) et 140 dégâts significatifs dus à la foudre (+20% par rapport à 2021).
 
Les cartes ci-dessous (vert : fortes chutes de grêle, jaune, orange et rose : rafales convectives > 90 km/h, micro/macrorafales, bleu : pluies intenses, rouge : dégâts dus à la foudre) présentent la répartition géographique de chaque phénomène observé.

On note une activité grêle extrêmement marquée avec de multiples fortes chutes qui ont provoqué des dégâts significatifs sur bon nombre de régions. Il faut noter que, sur la seule période du 18 au 23 juin, ce sont près de 1400 fortes chutes de grêle qui ont été recensées, soit près du quart de l'ensemble du recensement annuel, avec des grêlons parfois géants.
Les événements venteux sont quant à eux assez bien répartis sur l'ensemble du territoire français. La répartition spatiale des événements pluvieux intenses est typiquement plus fortement représentée sur les régions du sud-est.

L'année 2022 a été plus instable que la normale sur une vaste zone qui s'étire de l'ouest de l'Afrique jusqu'au Pôle Nord, en passant par l'Europe.  A l'inverse, l'instabilité a été moins marquée qu'à l'ordinaire sur certaines portions de l'Atlantique Nord, aux abords du sud du Groenland, et sur une grande partie des Etats-Unis.

La France a donc été concernée par un excédent d'instabilité en 2022. Et cet excédent s'est avéré particulièrement significatif : l'année 2022 constitue désormais le nouveau record d'instabilité annuelle moyenne la plus élevée en France depuis au moins 80 ans, et vraisemblablement depuis près de deux siècles sur la base des réanalyses disponibles à ce jour. L'anomalie positive a été particulièrement marquée sur le sud du pays, où l'on note des rapports à la normale supérieurs à 100%, c'est-à-dire une instabilité moyenne plus de deux fois supérieure à la normale. Plus on se dirige vers le nord du pays, plus les excédents d'instabilité ont été limités ; mais l'excédent est néanmoins généralisé.

Au total, l'année 2022 fait suite à trois années consécutives de baisse de l'instabilité, et détrône au passage 2018 de son statut d'année record pour la France. A noter qu'il faut remonter à 2010 pour observer une instabilité moyenne inférieure aux normales 1991-2020.
Malgré cet excédent d'instabilité, l'activité orageuse a été moins fréquentes qu'à l'ordinaire, comme on l'a vu plus haut, en raison principalement d'un défaut de forçages durant les journées les plus instables. Toutefois, lorsque ces forçages se sont présentés sur le pays, la très forte instabilité en présence a permis la formation d'orages plus souvent violents.

Sur un plan thermique, la majeure partie de l'Europe a connu a connu des températures supérieures aux normales, autant dans les basses couches (vers 1500 mètres ci-dessous à gauche), qu'en altitude (vers 5500 mètres ci-dessous à droite). Cette situation contraste de manière nette avec 2021, qui avait présenté une situation sensiblement moins chaude. En Europe, seule une région aux confins de la Pologne, de l'Ukraine et de la Biélorussie a présenté en 2022 une température moyenne en léger déficit à 1500 mètres d'altitude.
A grande échelle, les excès de chaleur les plus remarquables en basses couches ont été observés sur le bassin méditerranéen occidental et le sud de la France, ainsi qu'aux latitudes polaires. A l'inverse, les températures ont été anormalement froides aux abords du Cap Vert (pour la deuxième année consécutive), sur certaines portions du Canada, ainsi qu'entre Libye, Niger et Tchad :

Sur un plan dynamique, on note en 2022 une vaste zone de pressions plus élevées que la normale du nord de l'Afrique jusqu'à l'Europe. De ce fait, les conditions dynamiques ont favorisé les remontées d'air chaud depuis le Sahara et l'Atlantique subtropical, tout en étant rarement propices à des événements météorologiques sévères, faute de forçages dépressionnaires fréquents. 

Corollaire de cette configuration, les contenus en eau précipitable ont été plus élevés qu'à l'ordinaire sur l'Europe, et notamment entre Espagne et France, ce qui a pu favoriser la survenue ponctuelle de pluies particulièrement intenses sous orages :