Observatoire français des tornades et orages violents

Tornade EF1 à Courtenay (Loiret) le 16 septembre 2015

Le 16 septembre 2015, vers 14h10 locales, une tornade de faible intensité (EF1) traverse une partie du Gâtinais montargois et le nord-ouest du département de l'Yonne. La commune de Courtenay, traversée par le tourbillon sur sa partie sud, subit les dommages les plus significatifs.
 
La tornade de Courtenay s'inscrit dans un outbreak de tornades (épisode de tornades groupées) qui totalise 3 cas pour la journée du 16 septembre 2015, dont la tornade EF1 de Jandun (Ardennes) et la tornade EF2 de Sonnac (Charente-Maritime).
 

Principales caractéristiques de la tornade

Localisation de la tornade EF1 de Courtenay (45) du 16 septembre 2015* intensité maximale : EF1 soit des vents estimés entre 135 et 175 km/h
* distance parcourue : 15,1 kilomètres
* largeur moyenne : 200 mètres (aspirations périphériques jusqu'à 400 mètres)

* communes traversées : CHUELLES (le Marchais de la Vaisselle, le Moulin à Vent, les Comtes, les Pays) ; SAINT-HILAIRE-LES-ANDRÉSIS (bois des Longuches, les Créneaux) ; COURTENAY (bois de Clory, Bel-Air, les Haies de la Ville, collège Aristide Bruant, rue du Cormier, rue de Chuelles, route de Triguères, rue du M. de Lattre de Tassigny, rue du Stade, château d'eau , gendarmerie, zone industrielle, la Genêtre) ; PIFFONDS (les Augis, A6, la Picauderie, les Glimonières, les Souchers, le Petit Marchais, Petit Launay)
* départements : LOIRET (45), YONNE (89)
* altitude moyenne du terrain : 170 mètres
* type de terrain : tissu urbain discontinu ; terres arables hors périmètres d'irrigation ; systèmes culturaux et parcellaires complexes ; surfaces essentiellement agricoles, interrompues par des espaces naturels importants ; forêts de feuillus

* principaux dégâts : arbres adultes (peupliers, bouleaux, frênes, saules, pins, épicéas) déracinés ou brisés net ; champs de maïs couchés ; toitures d'habitations endommagées (30% du toit maximum) ; toitures en tôles de plusieurs magasins et usines en partie arrachées ; une partie de la toiture du collège Aristide Bruant arrachée et projection de légers débris jusqu'à 350 mètres ; gaine électrique d'un château d'eau arrachée ; mobilier urbain et poteaux électriques inclinés ; mobilier de jardin détruit ; projections de branches d'arbres (70 à 80 mètres) et de tôles tordues par le vent (200 à 300 mètres)

NB : l'intensité des tornades est déterminée sur l'échelle EF augmentée. Cette version de l'échelle EF, mise en place par KERAUNOS depuis 2009, ajoute aux critères américains une série de spécificités propres à l'habitat européen.
 

Trajectoire de la tornade

 
© Keraunos (fond de carte: Géoportail
 
© Keraunos (fond de carte: Géoportail)
 

Le sud de l'agglomération de Courtenay touché

Une enquête de terrain a été effectuée par Keraunos pour cette tornade.
 
Les premiers dégâts sont identifiés au nord-ouest de la commune de Chuelles, où quelques branches de peupliers sont brisées majoritairement vers le nord. La tornade, peu structurée, produit de faibles dommages au nord de l'agglomération sur une bande de 50 mètres de largeur : branches brisées, tuiles ou ardoises déplacées. Au sud de Saint-Hilaire-les-Andrésis, la tornade reste de très faible intensité (EF0) et traverse essentiellement des parcelles forestières. Au bois des Longuches, quelques cimes sont écrêtées, tandis que des arbres moins résistants sont tordus aux Créneaux.
 
Lors de son entrée sur le territoire communal de Courtenay, la tornade se structure davantage : le couloir, bien délimité, atteint rapidement 200 mètres de large et cette caractéristique perdure sur une trajectoire de 5 kilomètres. Dans la petite dépression naturelle formée par le ru des Haies de la Ville, des essences vigoureuses (peupliers, frênes) sont ébranchées.
 
En gagnant le sud de l'agglomération de Courtenay, la tornade se renforce et atteint l'échelon EF1 sur une portion d'environ 3 kilomètres. En survolant le collège Aristide Bruant, le tourbillon arrache une partie de la toiture et le hall d'entrée est éventré. Des débris sont retrouvés dans un champ à 350 mètres. Dans le périmètre du collège, quelques habitations sont touchées, le mobilier de jardin détruit et le mobilier urbain endommagé. Un axe de convergence est clairement identifié à l'intersection des rues de Chuelles et des Ormes : au sud de l'axe principal parcouru par le tourbillon, un lampadaire et un poteau électrique en bois sont couchés respectivement vers le Nord/Nord-Est et le Nord. Jusque dans la zone industrielle, la tornade produit des dégâts dans plusieurs lotissements et fauche de nombreux arbres dans des jardins ou des clairières. Les témoins l'assurent : "C'était vraiment un tourbillon". Dans le périmètre du château d'eau, de la gendarmerie et du stade, les dommages sont les plus nombreux : arbres de toutes natures couchés ou brisés net (dont de gros pins, des bouleaux, des frênes). Leurs branches sont projetées jusqu'à 70 ou 80 mètres. Un petit entrepôt métallique présente également quelques affaissements en périphérie sud-est du couloir. Une gaine électrique est même partiellement arrachée du château d'eau. Plusieurs toitures d'habitations sont touchées de part et d'autre de l'ancienne voie ferrée. Au pire, 30% du toit est endommagé.
 
Dans la zone industrielle, la tornade frappe plusieurs bâtiments. Les vitres du hall d'entrée d'une entreprise sont brisées dans la rue de l'Artisanat. Des panneaux et des palettes en bois sont transportés à grande distance. En périphérie nord-est de la zone industrielle, la toiture métallique d'une usine (45 x 70 mètres) est partiellement arrachée sur une superficie d'environ 100 mètres carrés. Des débris sont retrouvés dans un champ voisin à 250 mètres.
 
Avant son entrée dans le département de l'Yonne, la tornade traverse un point bas et brise plusieurs arbres en bordure d'un plan d'eau. Au-delà de ce point, le tourbillon franchit un plateau et s'évase considérablement, tout en perdant rapidement en puissance. Au sein d'un couloir élargi (entre 350 et 400 mètres), des dommages d'intensité EF0 sont observés en plusieurs points de la commune bourguignonne de Piffonds. Les dernières traces du passage de la tornade sont identifiées à hauteur du Petit Launay, après plus de 15 kilomètres de trajectoire.
 
Photographies des dégâts les plus représentatifs de la tornade de Courtenay :    

A
1    Toiture du collège Aristide Bruant partiellement arrachée
2    Clôtures et grille du collège Aristide Bruant tordues ou couchées
3    Gaine électrique du château d'eau partiellement arrachée
4    Frêne déraciné et multiples branches d'arbres brisées près de l'ancienne voie de chemin de fer
5    Têtes de platanes sectionnées, peupliers d'Italie brisés à mi hauteur
6    Clôture renversée et épicéas adultes étêtés, rue de Joigny
7    Végétation endommagée près de la nouvelle gendarmerie
8    Végétation endommagée près de la nouvelle gendarmerie : épicéas adultes sectionnés à environ 4 mètres de hauteur
9    Arbre fruitier ébranché aux Augis, commune de Piffonds (Yonne)
10    Environ 100 m² d'une toiture en tôles d'un hangar industriel arrachés, projections jusqu'à 250 mètres
 

Analyse des conditions météorologiques

La tornade de Courtenay s'est formée dans la portion sud d'un système convectif de petite dimension, à tendance linéaire, qui s'était formé environ une demi-heure plus tôt à la frontière entre Loiret, Loir-et-Cher et Cher. Cette structure convective a présenté de fortes réflectivités radar, ainsi qu'une activité électrique soutenue au nord immédiat de la trajectoire de la tornade (voir ci-contre), et a transité entre Centre, Bourgogne puis Champagne en conservant une certaine autonomie durant environ 2 heures, avant d'être absorbée par une système multicellulaire de grande ampleur, avec signature en LEWP.


En l'absence de données Doppler exploitables, il est délicat d'établir si cette tornade est liée ou non à un mésocyclone durable et profond (structure supercellulaire). La configuration présentée par les réflectivités laisse plutôt envisager un misocyclone, généré dans une zone fortement cisaillée en limite sud du système multicellulaire linéaire qui balayait le secteur au même moment.
 
Comme le montre le champ ci-dessous à gauche, issu du modèle WRF 13 km Europe, un très rapide flux sud-ouest était en position ce mercredi 16 septembre 2015 sur la France, en altitude, à l’avant d’un thalweg très dynamique qui approchait par l’Atlantique. Le département du Loiret et ses environs se trouvent dans une configuration de sortie gauche d'un rapide de jet (jet streak) pointant à près de 250 km/h vers 10.000 m d'altitude. Conjointement, à l'étage moyen, un thalweg thermique bien dessiné circule du Golfe de Gascogne en direction du Poitou et de la Bretagne (ci-dessous à droite) :

A
La circulation simultanée d'une onde de hautes valeurs de thêta en basses couches entre le sud-ouest et le nord-est du pays (advections d'air chaud et humide) a contribué à instabiliser les profils tout en accentuant les cisaillements de vent dans les premiers kilomètres de l'atmosphère. Le modèle simule ainsi une MUCAPE supérieure à 1000 J/kg et un MULI de -3K sur la zone :

 

En savoir plus sur les tornades

+  consulter  la  liste des tornades en France
+  découvrir  la  climatologie des tornades en France