Observatoire français des tornades et orages violents

Tornade EF3 à Trébeurden (Côtes-d'Armor) le 30 janvier 1836

Dans la nuit du 30 janvier 1836, une tornade meurtrière de forte intensité (EF3) traverse l'ouest de la commune de Trébeurden, dans les Côtes-d'Armor. Issu d'une trombe marine, le phénomène détruit notamment le sémaphore de Bihit et le hameau de Trozoul, dont les maisons ne seront jamais reconstruites. 
 

Principales caractéristiques de la tornade

Localisation de la tornade de Trébeurden (22) du 30 janvier 1836intensité maximale : EF3, soit des vents estimés entre 220 km/h et 270 km/h
* distance parcourue : 1,9 kilomètre
* largeur moyenne : indéterminée

* commune traversée : TRÉBEURDEN (Trozoul, sémaphore de Bihit)
* département : CÔTES-D'ARMOR (22)
* altitude moyenne du terrain : 30 mètres
* type de terrain : territoires artificialisés, territoires agricoles, zones humides

* principaux dégâts : 19 chaumières détruites (pas plus d'informations) ; talus, arbres et maisons renversés, déracinés, enlevés, dispersé ou détruits

NB : l'intensité des tornades est déterminée sur l'échelle EF augmentée (English version) . Cette version de l'échelle EF, élaborée et mise en place par KERAUNOS depuis 2009, ajoute aux critères américains une série de spécificités propres à l'habitat européen et permet ainsi une notation précise des tornades, valable autant pour les tornades contemporaines que pour les tornades du passé, et homogène internationalement.
 

Trajectoire de la tornade

Trajectoire présumée de la tornade EF3 de Trébeurden (Côtes-d'Armor) du 30 janvier 1836 :

Trajectoire présumée de la tornade EF3 de Trébeurden (Côtes-d'Armor) du 30 janvier 1836. © Keraunos (fond de carte : Carte de l'Etat-Major de 1820-1866) © Keraunos (fond de carte : Carte de l'Etat-Major de 1820-1866)
 

Le sémaphore de Bihit et le hameau de Trozoul détruits

Selon toute vraisemblance, la tornade de Trébeurden, issue d'une trombe marine, est rentrée dans les terres au niveau de Trozoul, avant de traverser le secteur du sémaphore de Bihit.
 
Survenue dans un contexte de traîne active (de l'orage est signalé le même jour à Saint-Brieuc et à Pordic), la tornade de Trébeurden est remarquable par son intensité en pleine saison hivernale : au hameau de Trozoul, 19 habitations sont détruites et quatre enfants sont écrasés sous les décombres. Plusieurs d'entre eux (le nombre est incertain) périssent.
 
D'après le Lloyd Nantais du 9 février, la tornade dévaste tout sur son passage sur un parcours de 2 kilomètres : "Cette trombe dépassant presqu'aussitôt la pointe de cette île (Milliau), entre sur la commune de Trébeurden qu'elle sillonne l'espace d'une demie-lieue, dans la direction du Nord-Est [Ouest] au Sud-Est. Talus, arbres, maisons, en un mot, tout ce qui se trouve sur le passage de cet effrayant météore, est en un clin-d'oeil renversé, déraciné, enlevé, dispersé ou détruit." Le sémaphore de Bihit, situé dans l'axe du tourbillon, est également démoli.
 
En l'absence d'informations plus détaillées sur la structure du sémaphore et la nature de l'habitat dévasté, la tornade de Trébeurden est classée EF3 sur l'échelle de Fujita améliorée.
 
La tornade de Trébeurden a marqué les esprits du village, dont certains ont cru, à tort, à un raz-de-marée. Les habitants sinistrés du hameau de Trozoul n'ont jamais rebâti leurs maisons et ont dû s'installer dans le quartier voisin de Bonne Nouvelle.

Analyse de la situation météorologique

La situation météorologique du 30 janvier 1836 a pu être reconstituée à partir des données du programme de réanalyses "20th Century Reanalysis" mené par la NOAA, l'ESRL et le PSD. L'approche ensembliste développée par ce programme permet de reconstruire par modèle les conditions météorologiques à tous les niveaux de l'atmosphère à partir d'un nombre restreint de données d'observations. Les résultats sont certes à considérer avec une certaine prudence compte tenu des périodes reculées auxquelles ils s'appliquent, mais ils présentent un bon degré de fiabilité qui permet une reconstruction pertinente de la plupart des épisodes météorologiques majeurs des 200 dernières années.

Même si les données présentent un caractère lissé sur des années aussi anciennes, il apparaît que la journée du 30 janvier 1836 est dominée par un flux polaire maritime instable, piloté par un minimum d'altitude circulant à proximité de la Scandinavie. Il s'ensuit un très rapide flux de nord-ouest sur la France, avec enfoncement d'un thalweg sur les régions du nord et du nord-est :


L'analyse des basses couches met en évidence une trace de front froid, étirée à la mi-journée des Charentes au Jura, et une configuration de traîne près de la Manche. Le front froid et la traîne sont actifs dans la réanalyse avec, en cours de nuit, des précipitations plus particulièrement soutenues d'une part entre Aquitaine, Limousin et Lorraine au niveau de la limite frontale, et d'autre part le long de la Manche dans la traîne. C'est au sein de cette traîne active que la tornade s'est développée.



 

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