Observatoire français des tornades et orages violents

Forts orages grêligènes dans l'est et macrorafale à Gérardmer le 30 juin 2012

La journée du samedi 30 juin 2012 a été marquée par le développement d'orages de grêle supercellulaires particulièrement sévères entre l'Auvergne et la Bourgogne ainsi que par des orages violents producteurs de grêle et de violentes rafales convectives de la Franche-Comté à l'Alsace.
Des chutes de grêle atteignant jusqu'à 9 cm de diamètre (900 grammes) ont notamment été observées en Côte-d'Or et dans le Doubs ainsi que des grêlons de 6 à 7 cm en Saône-et-Loire.
Entre la Franche-Comté, les Vosges et l'Alsace, des rafales de vent de 90 à 130 km/h ont provoqué des dégâts importants sur plusieurs communes. Ces orages fortement venteux ont également produit des précipitations intenses avec inondations ainsi que des chutes de grêle significatives sur ces départements.

 

Contexte météorologique

Un thalweg d'altitude, positionné sur le proche Atlantique depuis plusieurs jours, s'est progressivement rapproché de la France ce 30 juin 2012. Ce dernier a advecté une masse d'air très chaude et fortement chargée en humidité (valeurs de thêta'w excédant 20°C à 850 hPa). Les profils atmosphériques se sont conséquemment dotés d'une instabilité très marquée à tous les étages (parfois plus de 2500 J/kg de MUCAPE). En altitude, une branche de jet relativement vigoureuse (plus de 160 km/h à 250 hPa) circulait entre l'Aquitaine et les Ardennes, positionnant l'est du pays en entrée droite de jet avec divergence modérée en altitude. Dans les basses couches, une convergence des vents bien dessinée s'est rapidement constituée, couplée à un renforcement du jet de basse couche sur l'est de la Lorraine, la Franche-Comté et l'Alsace. Dans cet atmosphère très cisaillée (plus de 35 m/s en profondeur, plus de 15 m/s sur la tranche 0-3 km), l'environnement s'est montré propice au développement d'orages potentiellement supercellulaires et producteur de fortes chutes de grêle. En se dirigeant vers l'extrême nord-est de la France, l'accentuation de la dynamique d'altitude (fort soulèvement synoptique) en phase avec un creusement méso-dépressionnaire en Allemagne ont contribué à rendre les orages très venteux.

Le bulletin de prévision 24h émis par KERAUNOS le 30 juin à 08h locales mentionnait un risque de forts orages de grêle sans potentiel venteux de l'Auvergne à la Bourgogne et un risque d'orages violents en raison de chutes de grêle, fortes précipitations et violentes rafales de vent entre la Franche-Comté, l'est des Vosges et l'Alsace :

 

 

En milieu d'après-midi, les premières cellules orageuses se développent dans le Puy-de-Dôme et frappent la région de Clermont-Ferrand. Elles adoptent très vite un potentiel grêligène très marqué, puisque des chutes de grêle de 2 à 4 cm, parfois davantage sont observées sur le secteur. Rapidement, la convection gagne l'Allier et la Bourgogne puis le département du Jura. 

Initiation de la convection en Saône-et-Loire vers 16h30 depuis le Mont de la Mère Boitier - Crédit photo Jérôme MEGARD


Le potentiel supercellulaire se vérifie par des comportements typiques tels que dédoublements de cellules avec persistance des deux moteurs. Deux supercellules sont interceptées par Nicolas GASCARD dans le Jura. Un dossier spécial sera mis en ligne très prochainement sur cette chasse remarquable. 

Moteur droit de la première supercellule de la journée. Mésocyclone et nuage mur durant plus de 30 minutes.
Rotation importante et puissant RFD - Photographie Nicolas GASCARD à Pierre-de-Bresse

 

Parallèlement, la convection reste intense entre Bourgogne et Franche-Comté, comme en témoigne cette photographie de mammatus prise par Will HIEN entre Saône-et-Loire et Jura aux confins de la Bresse aux environs de 19h25 :

Photographie de mammatus prise à 19h25 au nord-est de la Saône-et-Loire en plaine de Bresse - Crédit photo Will HIEN

 

L'ensemble de ces orages produisent des chutes de grêle parfois impressionnantes, dont les diamètres approchent localement le seuil des grêlons géants (9 cm et 900 grammes pour certains, parmi les plus gros). Les photographies ci-dessous, extraites de sites de presse (Infos Chalons) pour la plupart, mettent en évidence les calibres impressionnants des grêlons observés. Il faut remonter au 25 mai 2009 pour observer des grêlons de cette dimension en France.

    

    

  

Photographies de grêlons observés en Auvergne et Bourgogne (Infos Chalon et G. KREMER)

 

Des vidéos témoignent également de la vigueur des chutes de grêle aussi bien en Bourgogne qu'en Franche-Comté :

 
 
 
 
En soirée et première partie de nuit, la convection tend à s'organiser sur la Franche-Comté puis l'Alsace. Les orages adoptent des structures linéaires et/ou arquées et produisent des rafales convectives localement violentes. Une rafale de 127 km/h est ainsi relevée à Sélestat (67), d'autres atteignent 112 km/h à Vagney (88) et 105 km/h à Venisey (70). Outre le réseau de mesure Météo-France, des dommages dus au vent, parfois sévères, sont reportés sur les communes de Gérardmer (toitures du Lycée, de l'hôpital et d'immeubles arrachées), Remiremont, Scherwiller, Châtenois, Dambach-la-Ville, Thann ou Kientzville par exemple.
 
De Remiremont à Ban-sur-Meurthe-Clefcy (défilé de Straiture) en passant par Gérardmer, une puissante macrorafale a pu être identifiée avec des vents estimés entre 150 et 180 km/h. Les dégâts sur certains bâtiments et quelques parcelles de forêt sont localement importants.
 
 

 Photographie prise tout près de Besançon vers 20h30 - Crédit photo Mickaël NARCON

 

Champ de blé couché par le vent à Sélestat (67) -  Photo A. NICOLLE

 

Arrivée d'un arcus - Photo Henri BUFFETEAU

 
Arcus  près du village Le Prémourey (70) sur une hauteur vosgienne avec en face les plaines d'Alsace - Photo Sylvain MAUPETIT