Observatoire français des tornades et orages violents

Les orages en France en 2014 : bilan national

L'année 2014 enregistre une instabilité record à l'échelle nationale, tout juste devant 1976 et 1983, et devient l'année la plus orageuse depuis 2009.

 
Supercellule dans le Loiret le 9 juin 2014 - (c) Florent RENAUT
Orage du 9 juin 2014. Crédit photo : Florent RENAUT
 
 

265 jours avec orage en France en 2014

Au niveau national, on dénombre 265 jours avec orage en 2014, soit 4 jours de plus qu'en 2013. 73% des journées de l'année ont ainsi été marquées par au moins un orage sur la France. 
 
Contrairement à 2013, aucun département n'atteint la barre des 100 jours avec orage sur l'ensemble de l'année. C'est près de la Méditerranée que l'activité orageuse a été la plus fréquente en 2014. Ainsi, 93 jours d'orage sont comptabilisés dans les Alpes-Maritimes, 88 dans le Var, 82 en Haute-Corse et 76 dans les Alpes-de-Haute-Provence. Hors extrême sud-est de la France, c'est l'Isère qui comptabilise le nombre de jours d'orage le plus élevé (76 jours) suivi des Pyrénées-Atlantiques (75 jours) et du Pas-de-Calais (74 jours).

De manière conforme à la climatologie, ce sont les départements du nord-ouest de la France qui comptent le plus faible nombre de jours avec orage en 2014. Hormis Paris, la petite couronne et le Territoire de Belfort, dont le chiffre est biaisé par leur très faible superficie, c'est le département du Lot-et-Garonne qui ressort avec un nombre de jours avec orage de seulement 35. Cette année, grâce aux orages de masse d'air froid du début d'année, le Finistère arrive à 39 jours d'orage, tout comme les Côtes-d'Armor.
 
Carte du nombre de jours avec orage en France en 2014. (c) KERAUNOS       Ecart à la moyenne 2009-2013 du nombre de jours avec orage en France en 2014. (c) KERAUNOS
 
 
 

97 jours avec orages forts

La France a connu cette année plusieurs épisodes orageux significatifs. Ponctuellement isolés mais souvent greffés à de puissantes dégradations, de nombreux orages forts ou violents ont ainsi été relevés.

Sur l'année, la France comptabilise 97 jours avec orage fort (soit 25 jours de plus qu'en 2013), 33 jours avec orage violent (presque deux fois plus qu'en 2013) et 4 jours avec orage extrême. Il convient de signaler que les mois de janvier, février et mars, fortement orageux, contribuent significativement à ces fortes valeurs.

Les 3 cartes de gauche ci-dessous présentent la répartition géographique de ces occurrences.
La carte de droite montre quant à elle la proportion du nombre de jours avec orage au moins fort par rapport au nombre total de jours avec orage. Il ressort ainsi que le centre-ouest du pays, ainsi que Midi-Pyrénées, le Languedoc, les côtes de la Manche et les abords étendus du Massif-Central ont subi des proportions d'orages virulents significatives. Le rapport y dépasse les 20%
 
Carte du nombre de jours avec orage fort en France en 2014. (c) KERAUNOS  Carte du nombre de jours avec orage violent en France en 2014. (c) KERAUNOS  Carte du nombre de jours avec orage extreme en France en 2014. (c) KERAUNOS  Carte de la proportion du nombre de jours avec orage fort  sur le nombre de jours avec orage en France en 2014. (c) KERAUNOS
Cartes du nombre de jours avec orage fort, violent, extrême et proportion du nombre de jours avec orage au moins fort


Graphique présentant la répartition du nombre de jours avec orage en France en 2014 selon leur intensité. (c) KERAUNOSLe graphique ci-contre montre que plus d'un tiers des jours avec orage en France ont été au moins forts en 2014. Si les jours avec orages faibles ou modérés sont juste majoritaires, le taux de journées avec orages forts est très important, atteignant près de 37%. Par rapport aux années précédentes, ce taux est assez élevé.
On notera également que la proportion de jours avec orage violent atteint 12,5 %, ce qui constitue une valeur très importante.
 


2014 : année la plus orageuse en France depuis 2009

L'analyse de l'indicateur de sévérité orageuse (I.S.O) montre clairement que plusieurs vagues orageuses intenses ont concerné la France durant cette année. Au niveau national, l'I.S.O moyen ressort à 2,47, ce qui constitue la seconde valeur la plus élevée au cours des 6 dernières années, juste derrière 2009 (cf. graphique ci-dessous à gauche). La période fin juillet-début août se démarque par une activité particulièrement soutenue.
 
Les 7 journées avec un I.S.O supérieur à 22 se répartissent sur les mois de juin, juillet, août et septembre (cf. graphe ci-dessous au centre). La journée du 8 août 2014 est de loin la plus orageuse de l'année, avec des phénomènes sévères étendus (cf. graphe ci-dessous à droite). L'indice de cette journée (29,96) est le troisième le plus élevé depuis 2009 et la mise en place de cet indice.
 
ISO annuels moyen en France depuis 2009. (c) KERAUNOS  ISO quotidiens > 22 relevés en France en 2014. (c) KERAUNOS  ISO quotidiens relevés en France en 2014. (c) KERAUNOS
Graphes des ISO annuels (à gauche), des 7 journées avec ISO > 22 en 2014 (au centre) et des ISO quotidiens en 2014 (à droite)
 
 

Des orages grêligènes, très pluvieux et de nombreuses tornades

De nombreux phénomènes convectifs ont été recensés durant l'année. Ainsi, on a relevé plus de 50 tornades, près de 30 trombes marines, près de 600 rafales convectives > 90 km/h, plus de 1400 chutes de grêle > 2 cm, plus de 1300 lames d'eau significatives sous orages (le double par rapport à 2013) et plus de 170 dégâts dus à la foudre.
 
Les cartes ci-dessous présentent la répartition géographique de chaque phénomène observé. Les tornades sont traitées dans un bilan à part entière. Elles ne figurent donc pas dans le présent bilan.

On remarque sur ces cartes la concentration des fortes chutes de grêle sur un axe central qui s'étire des Pyrénées aux régions du nord et déborde vers les régions méditerranéennes. Le quart nord-est de la France est très épargné cette année. De même, les fortes rafales convectives relevées s'organisent autour du littoral de l'Atlantique, sur le Languedoc et du Nord-Pas de Calais aux Vosges.
C'est évidemment dans le sud-est qu'on trouve la plus forte concentration de lames d'eau significatives. La succession exceptionnelle d'épisodes méditerranéens explique ce constat.
 
Carte des chutes de grêle (> 2 cm) relevées en France en 2014. (c) KERAUNOS  Carte des rafales convectives (> 90 km/h) relevées en France en 2014. (c) KERAUNOS  Carte des lames d'eau significatives sous orages relevées en France en 2014. (c) KERAUNOS  Carte des dégâts dus à la foudre relevés en France en 2014. (c) KERAUNOS
Cartes des chutes de grêle > 2 cm, des rafales convectives > 90 km/h, des lames d'eau significatives sous orages et des dégâts dus à la foudre relevés en 2014
 
 
 
 

Une instabilité record, surtout dans le sud-est

L'analyse des anomalies annuelles de différents paramètres permet en partie d'expliquer les causes de cette activité orageuse marquée en 2014.
On constate sur les deux cartes ci-dessous qu'une grande partie de l'Europe centrale a connu des températures anormalement élevées aussi bien en basse couche (850 hPa) qu'à l'étage moyen (500 hPa). L'Europe de l'Ouest, et donc la France, a connu une anomalie de température très marquée en surface (+1.2°C). Cette anomalie se répercute également à 850 hPa (vers 1.500 m d'altitude) et atteint environ +0,9°C sur la France. Il s'agit de la 6ème année la plus chaude depuis la fin du 19e siècle vers 1.500 m d'altitude.
Plus haut en altitude, vers 5500 m, l'anomalie de température est négative. Des températures légèrement plus froides que la normale ont été observées du sud du Groenland à la France. Cette circulation d'air froid en altitude a contribué à renforcer régulièrement l'instabilité des profils verticaux.
 
Anomalie de température à 850 hPa en 2014 (°C). (c) KERAUNOS       Anomalie de température à 500 hPa en 2014 (°C). (c) KERAUNOS
 


Anomalies d'instabilité (MUCAPE) depuis l'an 2000 en France. (c) KERAUNOS De fait, les anomalies de MULI (Most Unstable Lifted Index) calculées sur l'année ressortent négatives à l'échelle de la France, et de façon plus générale sur une grande partie de l'Europe (carte ci-dessous à gauche). Cette anomalie négative reflète ainsi une instabilité plus élevée que la normale en moyenne durant l'année 2014.
Cet état de fait est confirmé par l'analyse des anomalies de MUCAPE (énergie convective potentielle disponible) au niveau de la France. Il ressort une très nette anomalie positive sur tous les départements. Au niveau national, l'anomalie atteint +58% et fait de 2014 l'année la plus instable en France depuis l'après-guerre, juste devant 1983 et 1976. 
A l'échelle régionale, seuls le sud-est de la France et la Normandie établissent un nouveau record d'instabilité. Ailleurs, cette année 2014 arrive entre la 2ème et la 6ème position, sauf dans le nord-est où l'instabilité a été bien moins remarquable.
 
Anomalie de MULI en 2014 (K). (c) KERAUNOS          Anomalie de MUCAPE en 2014. (c) KERAUNOS
 


En étudiant les paramètres dynamiques, on remarque que l'instabilité plus marquée que la normale a été associée à un dynamisme synoptique significatif. Ainsi, la pression moyenne réduite au niveau de la mer (carte ci-dessous à gauche) ressort clairement déficitaire faisant de 2014 une année plus dépressionnaire que la normale, pour la deuxième année consécutive.
En altitude, le courant-jet s'est révélé particulièrement dynamique, avec une anomalie positive annuelle de plus de 2 m/s sur le nord-ouest de la France (carte ci-dessous à droite), dans des configurations dominantes d'entrées droites de jet, favorables aux ascendances synoptiques.
 
Anomalie de pression mer en 2014 (hPa). (c) KERAUNOS       Anomalie du vent à 250 hPa en 2014 (m/s). (c) KERAUNOS  
 
 
 

Faits marquants de l'année 2014

L'année 2014 a été marquée par des phénomènes orageux réguliers et ponctuellement violents. 

Ainsi, lors de la plus grosse dégradation orageuse de l'année, le 8 août 2014, un derecho (très nombreuses occurrences de rafales convectives sur une zone étendue) a frappé le sud de la France. Deux jours plus tard, le 10 août 2014, un outbreak de tornades frappe le nord de la France.
Au mois de juillet, les orages ont été très fréquents et régulièrement marqués. Juin a aussi connu une sévère dégradation convective sur plusieurs régions de France : entre les 8 et 10 juin, des grêlons géants se sont abattus sur l'Ile-de-France, le Centre et le nord-ouest de la Bourgogne. 
Le mois précédent, le 21 mai 2014, la première violente dégradation de la saison chaude touchait une vaste secteur ouest de la France.
Durant l'automne 2014, particulièrement orageux et anormalement instable, une dizaine d'épisodes méditerranéens ont frappé successivement le Languedoc et la Provence. Des lames d'eau parfois proches de 400 mm en quelques heures ont été relevées entre Hérault, Gard et Ardèche. Sur plusieurs secteurs méditerranéens, il s'agit de l'automne le plus pluvieux depuis plus de 40 ans.