Observatoire français des tornades et orages violents

Ligne de grains venteuse (derecho) sur Nord-Pas de Calais et nord Picardie le 25 janvier

Une ligne de grains très active a balayé le samedi 25 janvier en soirée le Nord-Pas de Calais et la Picardie, générant des rafales convectives atteignant parfois 130 km/h et plusieurs tornades.

 
Image satellite vapeur d'eau de 18h TU ce samedi 25 janvier 2014
Image satellite vapeur d'eau de 18h TU : l'anomalie d'altitude s'enfonce vers la mer du Nord et pilote la ligne de grain balayant le nord du pays
 
 

Un évènement venteux de grande ampleur sur l'Europe de l'ouest (derecho*)

Comme prévu, un front froid très actif a balayé dès 18h TU le Nord-Pas de Calais, le nord de la Seine-Maritime et de la Picardie. Organisé sous la forme d'une ligne de grains étroite mais intense et circulant à l'aplomb d'une vigoureuse anomalie de tropopause, cette limite frontale a très rapidement transité au nord de la Seine.
 
A son passage, des chutes de grêle, des chutes de neige roulée (pluie et neige mêlées), de fortes pluies et de violentes rafales convectives ont été observées. Des rafales à 128 km/h à Calais, 126 km/h au Cap Gris Nez, 120 km/h à Boulogne, 108 km/h à Dunkerque et Abeville, 107 km/h à Steenvoorde , 106 km/h à Merville et 98 km/h à Saulty et Lillers ont été relevées.
 
*Cet épisode, que l'on peut qualifier de derecho, est détaillé sur la cette page.
 
 

De nombreux dommages sur le nord de la France

Les violentes rafales de vent produites par la ligne de grains ont provoqué des dommages parfois importants, notamment à l’ouest d’une ligne Arras-Lille. Les enquêtes de terrain réalisées par Keraunos ont permis d'identifier une multitude de rafales descendantes, ainsi que 4 tornades (2 dans le Pas-de-Calais, 1 dans le Nord et 1 dans l'Aisne).

Les dégâts causés par les rafales descendantes sont variés. Dans le Calaisis, plusieurs toitures ont été endommagées, notamment à Marck. A Calais même, les pompiers ont été sollicités à plusieurs reprises pour des tuiles envolées.

Dans l’arrondissement de Saint-Omer,  de nombreux arbres sont déracinés dans le secteur d’Ardres. A Louches, une toiture d’habitation est envolée. Dans les polders, plusieurs toitures sont partiellement arrachées (Offekerque, Nouvelle-Eglise). De nombreux arbres sont couchés ou brisés net (Saint-Folquin, Saint-Omer-Capelle). Une caravane est même mise sur le flanc à Vieille-Eglise.

Dans le Dunkerquois, les fils électriques sont jetés à terre (Bourbourg, Grande-Synthe, Brouckerque, Herzeele, Nieurlet). A Craywick, la robuste toiture de l’I.M.E est partiellement endommagée et la cheminée détruite. Dans les environs de Socx et de Crochte, plusieurs routes sont entravées par des chutes d’arbres. Toujours à Socx, un hangar agricole est complètement détruit près de l’échangeur n°16 de l’A25. Des arbres centenaires sont brisés net à Quaëdypre. A Eecke, le faux-plafond d’une école s’effondre sous l’action du vent.

Dans le Boulonnais, de nombreux arbres déracinés sont signalés autour de Desvres. A Bournonville, un hangar de bonne dimension est soufflé. A Menneville, de nombreux arbres couchés bloquent les routes.

Dans la vallée de la Lys et l’agglomération de Béthune, une toiture est partiellement arrachée à Mont-Bernanchon. Des poteaux électriques sont couchés ou penchent dangereusement (Calonne-sur-la-Lys, Annequin). Des fils électriques sont jetés à terre à Saint-Floris. De nombreuses toitures sont endommagées à Annezin, Labeuvrière et Fouquereuil.

Du bassin minier à la frontière belge, des coupures d’électricité sont signalées mais les dégâts sont moins importants, sauf sur l’extrême nord de l’Aisne où des toitures sont touchées (Etreux, Lemé).

 
Caravane couchée par les rafales descendantes, le soir du 25 janvier 2014, à Vieille-Eglise (Pas-de-Calais). (c) KERAUNOS       Toiture endommagée par les rafales descendantes, le soir du 25 janvier 2014, à Etreux (Aisne). (c) KERAUNOS
Caravane couchée à Vieille-Eglise (Pas-de-Calais) et toitures endommagées à Etreux (Aisne) par des rafales descendantes (25 janvier 2014).
 

 

Un système convectif qui s'est développé sur la Grande-Bretagne

Durant l'après-midi de ce samedi 25 janvier que la ligne de grain, alors déjà très active, s'est développée sur les îles britanniques. La signature radar (cf. illustration ci-contre) est rapidement devenue explicite. La ligne de grain a alors adopté des dimensions importantes, de plusieurs centaines de kilomètres de long. 
En Irlande, Ecosse, Pays de Galles ou dans le centre de l'Angleterre, des rafales convectives de 100 à 130 km/h ont été relevées. L'activité électrique associée à ce système linéaire s'est montrée particulièrement importante pour une fin janvier.

 
 

Des conditions météorologiques particulièrement dynamiques

Le développement de cette ligne de grains est lié à la circulation d'un thalweg d'altitude étroit et très dynamique, véhiculé par un puissant jet d'altitude atteignant plus de 260 km/h à 250 hPa circulant du Groenland vers la Bretagne. La zone balayée par la structure convective s'est alors retrouvée positionnée en sortie gauche de jet, ce qui a ainsi favorisé les fortes ascendances synoptiques et la divergence d'altitude.



Immédiatement à l'aplomb de l'anomalie de basse tropopause pilotant ce thalweg, de fortes vitesses verticales ont gagné le Nord-Pas de Calais et la Picardie. Le dynamisme synoptique s'en est trouvé fortement renforcé et a interagi avec une langue d'air doux et humide en basses couches, génératrice de profils verticaux instables et propice au développement d'une ligne de grains localement associée à une convection profonde.