Observatoire français des tornades et orages violents

Tornade EF0 à Silly-sur-Nied (Moselle) le 7 juin 2012

Une tornade de très faible intensité (EF0) est brièvement aperçue dans la campagne de Retonfey (Moselle) le 7 juin 2012, à 17h15 locales. En réalité, le phénomène, qui a pu être filmé par une équipe de chasseurs d'orages allemands, parcourt une distance totale de 6 kilomètres et traverse trois territoires communaux mosellans, dont celui de Silly-sur-Nied

Principales caractéristiques de la tornade

* intensité maximale : EF0, soit des vents estimés de 105 km/h à 135 km/h
* distance parcourue : 6 kilomètres
* largeur moyenne : 10 mètres

* communes traversées : RETONFEY (Devant le Bois, Vaudreville), SILLY-SUR-NIED (le Haut Buisson, le Fleuri-Pré), COURCELLES-CHAUSSY (Pont à Chaussy, D71)
* département : MOSELLE (57)
* altitude moyenne du terrain : 250 mètres
* type de terrain : tissu urbain discontinu ; zones industrielles et commerciales ; terres arables hors périmètres d'irrigation ; prairies ; forêt de feuillus

* principaux dégâts : quelques branches d'arbres cassées, sillons tracés dans les champs, fils électriques faiblement dénudés, tuiles déplacées ou enlevées (<20%)

NB : l'intensité des tornades est déterminée sur l'échelle EF augmentée. Cette version de l'échelle EF, mise en place par KERAUNOS depuis 2009, ajoute aux critères américains une série de spécificités propres à l'habitat européen.
 

Parcours de la tornade

 
© Keraunos (fond de carte : Géoportail)
 
La trajectoire suivie par cette tornade est originale, dans la mesure où elle a progressé avec un angle d'environ 90° sur la droite du flux directeur moyen. Ceci s'explique probablement par le fait qu'elle s'est formée dans la partie nord d'un système convectif (MCS) en cours de déstructuration. Au moment de la genèse du tourbillon, un amas anarchique de cellules convectives était alors en cours de morcellement dans cette zone, l'ensemble étant soumis à des cisaillements intenses (fond de thalweg de surface mobile). Il est donc probable que les flux de méso-échelle étaient temporairement très chaotiques dans ce secteur et que le déplacement des cellules convectives s'en est trouvé fortement dévié par rapport au flux moyen de l'environnement synoptique.

Photographies du phénomène

La tornade a été aperçue dans des conditions météorologiques difficiles. Les deux photographies suivantes sont extraites d'une vidéo qui montre la tornade jusqu'à sa première phase de dissipation. Le buisson est brièvement visible durant quelques secondes : 

   > vidéo prise par un groupe de chasseurs d'orages
    

Un couloir de dégâts très étroit

Une enquête de terrain, effectuée par Kévin Leclercq pour KERAUNOS, confirme le passage d'un phénomène tourbillonnaire sur une trajectoire totale de 6 kilomètres, entre les abords de l'autoroute de l'est (commune de Retonfey) et la D71 au sud-ouest de Courcelles-Chaussy.

Si la trajectoire est linéaire sur la majeure partie du parcours de la tornade, nous notons toutefois une influence au sol irrégulière et plutôt sinueuse durant le premier kilomètre à partir duquel le contact au sol est établi. Le bois de Fey, qui précède le hameau de Vaudreville, est épargné bien que des dégâts à la végétation soient observés de part et d'autre. Nous pouvons supposer que la tornade a contourné le bois par le sud-ouest, et produit quelques aspirations périphériques à l'écart du tourbillon principal.
 
Quelques jours après le passage de la tornade, des sillons très nets dans les champs sont toujours visibles. Ces derniers coïncident parfaitement avec l'axe de déplacement de la tornade et apparaissent jusqu'à la dissipation du phénomène un peu au-delà de Pont-à-Chaussy. De part et d'autre de cet axe linéaire, les champs sont totalement épargnés.

Photographies des principaux dommages :
 
 
© Kévin Leclercq

Contexte météorologique

La situation météorologique qui prévalait ce 7 juin 2012 était caractérisée par une forte dynamique, notamment liée à une puissante branche de courant-jet, qui ceinturait le pays de l'Aquitaine aux Ardennes (Fig. 1). En fin d'après-midi, la Lorraine se trouvait ainsi positionnée dans une portion fortement divergente de ce courant-jet, productrice d'un fort soulèvement dynamique, pour partie lié à l'approche d'une anomalie de tropopause dynamique par l'ouest. Cette dynamique d'altitude était relayée en surface par la progression d'un thalweg, étiré au moment de la tornade sur un axe Normandie / nord Lorraine (Fig. 2). Ce dernier a renforcé les forçages par accentuation de la convergence en basses couches.

L'ensemble s'est produit dans un environnement rendu instable par des advections rapides et massives de hautes valeurs de thêta dans les basses couches, comme en atteste la Fig. 3. Les indices de soulèvement résultants approchaient dès lors -6 K (Fig. 4), pour une MLCAPE localement supérieure à 1500 J/kg (Fig. 5). Cette forte instabilité a été d'autant plus propice à une formation de tornade que les basses couches, très humides et cisaillées, présentaient au même moment une SRH supérieure à 100 m²/s² sur l'épaisseur 0-1 km et des niveaux de condensation très abaissés (Fig. 6).

Ce risque de tornade avait été identifié et mentionné dans le bulletin de prévision convective émis le matin même à 08h locales. Cette journée présentait par ailleurs des risques orageux localement sévères, qui se sont traduits par une multitude de phénomènes convectifs sévères et destructeurs.

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